vendredi 6 mars 2009

L'oeil extérieur

En août 1998, Sylvie Nicolas est à Montréal : pendant ce temps, des agents de la DPJ débarquent chez elle et enlèvent sa fille, nous apprend-on en quatrième de couverture du nouveau recueil, espéré et attendu, Dix minutes avant l’heure aux montres de Dali. Rassurez-vous immédiatement, la poète n’est pas un bourreau d’enfant : c’est une vulgaire erreur sur la personne qui a motivé ce rapt irréel. Derrière cet événement, on sent l’amorce, ou plutôt la fin : celle où l’on décroche. On a l’impression que cette erreur sur la personne est une faille dans laquelle tout l’être de Sylvie Nicolas a glissé, au complet, et qu’elle regarde depuis le monde d’un autre ailleurs, avec un œil extérieur, critique, acerbe, mais sensible, réaliste et paisible. « Il suffit de peu pour étouffer le souffle lent des aurores boréales, pour leur retirer leur couleur », écrit Sylvie Nicolas, comme si elle parlait d’elle-même. L’enlèvement de sa fille a peut-être servi nourri et motivé l’écriture de ces nouveaux vers, mais il n’est pas question que de cet événement dans ce recueil : c’est un constat beaucoup plus large qui nous est livré. Les mots égratignent : quelle est au juste cette société dans laquelle nous vivons? Après quelques années de silence, Sylvie Nicolas nous revient enfin, plus sensible et engagée que jamais. Des images fortes, meublées de quotidien, rendent ce recueil accessible, direct et percutant.

Dix minutes avant l'heure aux montres de Dali, de Sylvie Nicolas, Collection Mains libres, chez Québec/Amérique.

Aucun commentaire: